Rappel des règles sur la responsabilité civile et pénale de l'administrateur de S.A.(*)
(*) S.A. Société Anonyme comme France Télévisions par exemple.
En cas de faute, l'administrateur peut engager sa responsabilité aussi bien sur le plan pénal que civil ou encore lors d'une procédure collective. Le point sur ces trois types de responsabilité ici.
Dans une société anonyme, le mandat d'administrateur ne doit pas être pris à la légère. Si un actionnaire peut être dormant, ce ne doit pas être le cas d'un membre du conseil d'administration. En cas de faute (et la négligence est une faute), un administrateur peut voir sa responsabilité engagée sur trois plans:
- responsabilité civile si la faute a causé un préjudice à la société ou à un tiers,
- responsabilité particulière en cas de procédure collective,
- responsabilité pénale dans les cas de fraude.
I) La responsabilité civile
En application de l'article L.225-251 du Code de commerce, "les administrateurs et le directeur général sont responsables individuellement ou solidairement selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion".
Un administrateur est donc susceptible de voir sa responsabilité civile engagée pour trois types de fautes:
- une infraction aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes.
- une violation des statuts
- une faute de gestion
Les administrateurs ont un rôle limité en matière de gestion. La gestion de la société est en effet davantage assurée par le Président du conseil d'administration ou le directeur général.
Cependant, les administrateurs ont le devoir de contrôler la gestion du Président du conseil d'administration ou du Directeur Général. C'est davantage en cas de manquement ou de négligence dans ce devoir de contrôle qu'un administrateur est susceptible de voir sa responsabilité engagée pour faute de gestion (par exemple parce qu'un administrateur n'assiste jamais aux réunions du conseil d'administration et ne peut de ce fait pas contrôler l'action du Président du conseil d'administration ou du Directeur Général).
Pour que la responsabilité d'un administrateur soit engagée, trois éléments cumulatifs doivent être réunis:
- une faute (infraction aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, violation des statuts ou faute de gestion),
- un préjudice (par exemple, la faute de l'administrateur a eu des conséquences financières pour la société),
- et un lien de causalité (le préjudice doit avoir été causé, au moins en partie, par la faute).
L'article L.225-251 du Code de commerce précise en outre que "si plusieurs administrateurs ou plusieurs administrateurs et le directeur général ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage". Ainsi, si un seul administrateur a commis une faute, il peut être poursuivi individuellement.
Mais tous les administrateurs peuvent voir leur responsabilité engagée si la faute est imputée au conseil d'administration.
Dans ce dernier cas, un administrateur qui se sera opposé de manière expresse et non équivoque à la décision du conseil d'administration pourra néanmoins échapper aux poursuites (le simple fait de voter contre n’étant pas a priori suffisant), ce qui démontre bien la nécessité pour un administrateur de ne pas se comporter en simple administrateur de complaisance.
Selon l'article L.225-253 du Code de commerce, "aucune décision de l'assemblée générale ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les administrateurs ou contre le directeur général pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat". Dès lors, le "quitus" généralement donné par l'assemblée générale au conseil d'administration est sans effet.
L'article L.225-254 du Code de commerce précise le délai de prescription de l'action en responsabilité engagée contre un administrateur: "l'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu'individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans. "
En plus de cette responsabilité civile, le régime de responsabilité d'un administrateur peut prendre une ampleur particulière si la société est l'objet d'une procédure collective.
II) La responsabilité particulière en cas de procédure collective
III) La responsabilité pénale
- Présentation de comptes non-fidèles
Article L.242-6 2° du Code de commerce: "Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375.000 euros le fait pour (…) le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme de publier ou présenter aux actionnaires, même en l'absence de toute distribution de dividendes, des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice, de la situation financière et du patrimoine, à l'expiration de cette période, en vue de dissimuler la véritable situation de la société".
Les comptes sont un élément très important pour juger de la solvabilité d'une société, pour les actionnaires comme pour les créanciers. Le Code de commerce réprime donc les dirigeants qui dissimulent la véritable situation de la société en ne fournissant pas des comptes présentant une image fidèle de ce qu'ils sont en réalité.
- Banqueroute
Dans le cadre d'une procédure collective, pour les fautes les plus graves, les dirigeants peuvent être condamnés pénalement pour banqueroute. Le délit de banqueroute est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.
Article L.654-2 du Code de commerce: « En cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, sont coupables de banqueroute les personnes mentionnées à l'article L. 654-1 contre lesquelles a été relevé l'un des faits ci-après :
1° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, soit fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
2° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur
3° Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;
4° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de l'entreprise ou de la personne morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation ;
5° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales. »
Source : Me Marc-Etienne Sebire et Me Bastien Bernard