La Cour des comptes avait choisi d'inverser l'ordre initial de ses rapports, en faisant passer celui de FTV derrière Radio France.
La Cour des comptes qui devait publier le rapport sur France Télés à l'automne 2024 a changé son fusil d'épaule et publié un rapport sur Radio France au début de l'année 2025.
Initialement, la Cour des comptes prévoyait de rendre public son rapport sur France Télévisions "avant" celui sur Radio France, dans le cadre d'une séquence de contrôles programmés sur les grands acteurs de l'audiovisuel public. Cependant, l'ordre a été inversé, avec le rapport sur Radio France publié en premier (début 2025), suivi de celui sur France Télévisions le 23 septembre 2025.
Cette "inversion" apparente du calendrier - où Radio France a été auditée en premier, suivie de France Télévisions après le processus de renouvellement pour la présidence de France Télévisions - ne serait pas, selon la Cour "un changement structurel officiel, mais plutôt une coïncidence liée à la planification interne de la Cour". Waouhhhh ! Elle interviendrait "dans un contexte de tensions budgétaires accrues pour l'audiovisuel public avec une réduction dans les dotations et dans le contexte du débats sur le projet de holding porté par la ministre de la Culture Rachida Dati avant sa démission"
Cette décision n'a pas été explicitement motivée dans les documents officiels de la Cour mais elle avait été évoquée dans plusieurs analyses journalistiques comme "une possible adaptation du calendrier" pour "des raisons d'actualité ou de priorités institutionnelles".
De quelles raisons d'actualité ou de priorités institutionnelles, pouvait-il bien s'agir ?
Il n'a avait aucune raison de faire passer le rapport de Radio France avant celui de FTV encore moins de prétendre "adapter le calendrier" :
- aucune priorité institutionnelle évidemment, le mandat de Sibyle Veil qui avait été reconduite à la présidence de Radio France pour un mandat de cinq ans à compter du 16 avril 2023, c'est-à-dire jusqu'en 2028...était loin d'arriver à terme.
- aucune raison d'actualité non plus, concernant la Maison ronde - c'est même tout le contraire - car la seule actualité qui prévalait était celle du renouvellement de la présidence de France Télés, au printemps 2025.
Historiquement, le calendrier de ces audits suit un rythme approximatif de 7 à 9 ans entre deux rapports sur la même entité. Pour France Télévisions, le précédent rapport qui datait de 2016 alertait sur une "impasse financière" fut réellement un coup d'épée dans l'eau. En toute logique si la situation de France Télés était déjà préoccupante dès 2016, pourquoi diable avoir décidé qu'elle n'était plus prioritaire ?
Ernotte qui dès 2015 par exemple, racontait au CSA (Arcom aujourd'hui) qu'elle allait mettre en place une comptabilité analytique dont la Cour des comptes allait souligner l'impérieuse nécessité l'année suivante (après un jugement de France Télévisions où Martin Ajdari son directeur financier figurait en bonne place), n'a évidement rien fait. Pire, elle a refait la même annonce devant ROM et sa troupe en 2020, toujours sans bouger et a remis le couvert en 2025 alors que l'IGF publiait un an plus tôt un rapport au vitriol (*) dont la Cour des comptes et l'ARCOM (#) avaient bien naturellement pleine connaissance.
(#) L'ARCOM dans « l’Avis motivé sur les résultats de la société France Télévisions de 2020-2024 » qu'il rendait également public, allait même jusqu'à énoncer clairement, entre autres sur les pages 120 et 121, les artifices comptables utilisés par l'entreprise publique dans la présentation de ses comptes :
« France Télévisions souligne s’être maintenue à l’équilibre d’exploitation sur l’ensemble de la période 2019-2023, conformément à l’objectif fixé par le COM. Cet équilibre s’entend « hors éléments non récurrents », le groupe ayant corrigé l’agrégat comptable de façon à neutraliser les coûts liés au projet Salto et au plan de départs.
L’indicateur du COM a ainsi été corrigé en ce sens a posteriori. Les coûts de Salto [estimés à 90M€ et non 50 comme certains voudraient le faire croire, ndlr] considérés comme non récurrents ont en pratique été imputés chaque année jusqu’à l’extinction de cette société en 2023.
En outre, en 2023, après l’abandon du projet Salto qui met fin à la correction, l’équilibre du résultat d’exploitation a résulté d’une modification des modalités d’amortissement comptable des programmes, qui représente selon les tutelles une amélioration de 30 M€/an. Sur l’ensemble de la période, l’équilibre d’exploitation doit ainsi être resitué dans un contexte de retraitements comptables.»
Qui peut gober à présent ceux qui racontent que la Cour et l'ARCOM ne savaient pas et surtout avaient chacune leur propres "priorités" ? Le 7 avril dernier le blog CGC Média publiait un article intitulé "Indigne courrier d’un proche ernottien à la Cour des Comptes pour ne surtout pas rendre son rapport visant France Télés avant que l’ARCOM se soit laissé endormir ! "
Tout cela va se terminer devant la Justice grâce aux plaintes déposées par la CGC de l'Audiovisuel. La dernière en date comme chacun le sait, vise à faire annuler au Pénal la mascarade du 14 mai dernier, sans parler de la commission d'enquête qui démarre à l'Assemblée nationale sous la conduite du député rapporteur Charles Alloncle où les dirigeants et autres huiles de France Télévisions vont devoir s'exprimer sous serment. Il en dira quoi de "ses échanges" avec la Cour, le monsieur "bons offices" ernottien en question ?
La prochaine procédure, toujours au pénal, devrait intervenit pour"présentation volontairement erronée d'un bilan financier (ou plus largement de comptes annuels inexacts)"
En droit français, la présentation volontaire d'un bilan financier erroné (ou plus largement de comptes annuels inexacts) constitue une infraction pénale grave, qualifiée de délit d'image infidèle des comptes ou de présentation de faux bilan.
Cette infraction vise à sanctionner les dirigeants qui, sciemment, donnent une image erronée de la situation financière, des résultats ou du patrimoine de l'entreprise, souvent dans le but de dissimuler des difficultés ou de tromper des tiers (associés, investisseurs, banques, etc.). Elle est régie principalement par le Code de commerce, avec des implications possibles dans le Code pénal pour des qualifications connexes comme l'escroquerie ou l'abus de biens sociaux.
Ernotte aura tout loisir d'expliquer ses propos tenus aux "200 top managers de France Télévisions" au webinaire d'août, où elle torpillait copieusement le groupe Canal+ propriété de Vincent Bolloré avec cette incroyable sortie de route sur Maxime Saada expliquant, en sorte, la différence entre privé et public : « En fait, quand on est une entité dans un groupe, même une filiale dans un groupe, on peut toujours noyer le poisson entre les différentes activités; le groupe [Public donc payé par les Français, en opposition avec ce qui suit, ndlr] prend en charge.
Quand vous êtes une entreprise cotée [Privé évidemment, ndlr] vous devez vous défendre par vous-même.."
Faire monter certains syndicats au créneau pour expliquer qu'"il faut un audiovisuel fort [qui dit le contraire ? ndlr] et contester la vision de la Cour "Loin de s'en prendre aux défaillances de l'État en matière de financement de l'audiovisuel public" en dénonçant sa façon de faire avec son lot "d'imprécisions" en écrivant "Si les représentants de la Cour des compets avaient fait un travail sérieux...", en prévoyant "des relations sociales qui n'ont pas fini de se tendre envers des gouvernants qui devraient commencer par montrer l'exemple" [certes, ndlr] ne règlera pas la situation de faillite du groupe dont Ernotte et bien responsable surtout après le dernière recapitalisation de 32M€ en juin 2023
(* IGF) (Les premières pages du rapport ci-dessous avec le lien pour y accéder)