Lisez l'article d'Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos paru dans Libération du 30/03/2010 intitulé: "Stéphane Courbit : le hic éthique fait tiquer"
« Il y a un problème déontologique. » Il lui aura fallu le temps, mais ça y est : Frédéric Mitterrand a mis le doigt dessus. Engagée depuis le 3 février, la vente de la régie publicitaire de France Télévisions à Stéphane Courbit, lui-même pourvoyeur de programmes pour la télé publique, pose un « problème déontologique ». C’est ce qu’a déclaré lundi à l’Association des journalistes médias le ministre de la Culture et de la Communication, qui a précisé : « Il va falloir qu’ils changent le périmètre de leur activité économique. Ils ne peuvent pas être juge et partie. » « Ils » ? Comprendre l’alliance formée par Publicis et Stéphane Courbit pour le rachat de 70% de la régie publicitaire de France Télévisions.
Problème parce que Publicis se retrouverait ainsi vendeur d’espaces publicitaires, acheteur d’espaces publicitaires et conseil en achat d’espaces publicitaires… Problème parce que Courbit, qui produit N’oubliez pas les paroles sur France 2, coifferait aussi la casquette de celui qui va vendre de la pub pendant le même jeu de Nagui… Sans compter l’autre problème déontologique de taille, celui que Mitterrand n’a pas évoqué : Alain Minc, muse de Nicolas Sarkozy pour la suppression de la pub, est actionnaire de la société de Stéphane Courbit, lui-même proche d’un certain Sarkozy Nicolas.
Dans l’entourage de Patrick de Carolis, on se satisfait d’avoir trouvé un tel allié au gouvernement. Car, depuis l’ouverture des négociations exclusives avec Courbit, ça ferraillait sec en coulisses. Deux groupes de travail ont été formés pour mettre au point des verrous entre les deux activités du producteur et futur patron de la régie Stéphane Courbit. Et ils viennent de rendre leurs conclusions, ainsi que l’indiquait dimanche Mediapart. « Il n’y avait pas de verrous juridiques possibles, explique à Libération le membre d’un groupe, il fallait donc se déplacer sur le terrain de l’éthique ; or, sur le plan déontologique, on ne peut être à la fois producteur à France Télévisions et opérateur de la régie. Nous allons donc demander à Stéphane Courbit de choisir. » Ou il s’assoit sur la régie, ou il s’assoit sur ses activités de producteur…
« No comment », disait-on hier chez Courbit. Mais sa réponse est déjà connue. Car la question lui a été posée par l’un des groupes de travail. « C’était assez violent, raconte un témoin, Courbit a répondu qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêt et que c’était vexatoire de mettre ainsi en cause sa loyauté. »
A l’aune de la déclaration de Frédéric Mitterrand, la présidence de France Télévisions juge la privatisation « clairement enterrée ». Et de passer à l’étape suivante : « Il faut garder la pub avant 20 heures. Il n’y a pas d’enjeu éditorial comme en soirée, on ne va pas diffuser de l’opéra ou du théâtre l’après-midi. » Prévue par la loi, la suppression de la pub en journée doit entrer en vigueur fin 2011. Mais il faudra bien que le gouvernement compense : même sans réclame en soirée, France Télévisions Publicité ramasse aujourd’hui 400 millions d’euros par an. C’est beaucoup, 400 millions d’euros, ma pauv’ dame, par les temps qui courent…
Du coup, l’hypothèse d’un maintien de la pub en journée fait sérieusement son chemin, dans l’opposition comme dans la majorité, jusqu’au chef même des députés UMP, Jean-François Copé, et le sujet devrait repointer le bout de son nez lors d’une table ronde à l’Assemblée nationale le 7 avril. A France Télévisions, on croise les doigts et on a même fait les comptes : « Sarkozy est largement minoritaire sur cette question et il ne peut compter que sur 20 à 25 parlementaires. » Carolis a d’ailleurs récemment prévenu, dans un entretien au JDD : « Si la publicité était maintenue avant 20 heures, la privatisation à hauteur de 70% ne se justifierait plus. Tout le processus serait à revoir. » Si on ajoute à cela que la taxe télécom supposée compenser l’arrêt de la pub après 20 heures (jusqu’à 350 des 450 millions d’euros attendus) est remise en cause par Bruxelles, on voit bien que le grand et bel édifice Suppression de la pub érigé par Nicolas Sarkozy a sacrément du plomb dans l’aile.
A ce propos, Frédéric Mitterrand - qui a visiblement décidé de mettre les pieds dans le plat et d’éclabousser tout le monde de sauce - a ressorti l’augmentation de la redevance du placard, certainement pour combler le trou béant creusé par la taxe retoquée. Laquelle redevance avait été l’objet d’homériques bastons en 2008 (souvenons-nous avec émotion du « Moi vivant, la redevance n’augmentera pas », de Jean-François Copé). Et voilà que notre jeune Mitte juge « pas choquant » de l’augmenter, allons bon.
Courbit, le rutilant ancien patron d’Endemol à qui tout réussit, connaîtrait-il là son premier revers ? A France Télévisions, on croit savoir que Courbit envisage, pour se tirer de cette mauvaise passe, de laisser traîner en longueur les négos. Oh, pas longtemps, un mois, deux tout au plus, le temps que le successeur de Carolis soit connu.
Car, oui, youpi, youpi, avec la fin des régionales, s’ouvre la saison du renouvellement du président de France Télévisions - le mandat de Patrick de Carolis arrive à expiration en août. Et Mitterrand a bien son idée, qu’il va souffler au Président. Mais celui-ci, pour la première fois, décidera seul et l’heureux élu sera… Alexandre Bompard, Simone Harari, Yamina Benguigui, Rodolphe Belmer, Rémy Pflimlin, Nicolas de Tavernost, Patrick Poivre d’Arvor, Etienne Mougeotte, Emmanuel Hoog, Christopher Baldelli, Dominique Farrugia, Denis Olivennes, Patricia Barbizet (si on ne tient pas le bon dans tout ça, c’est à pleurer).
Paru dans Libération du 30/03/2010
N.B: Libération écrit: « Carolis a d’ailleurs récemment prévenu, dans un entretien au JDD : "Si la publicité était maintenue avant 20 heures, la privatisation à hauteur de 70% ne se justifierait plus. Tout le processus serait à revoir". »
Et d'ajouter: "A France Télévisions, on croise les doigts et on a même fait les comptes : « Sarkozy est largement minoritaire sur cette question [celle de la supression totale de la pub] et il ne peut compter que sur 20 à 25 parlementaires. »
Décidément Carolis n'a pas peur du ridicule. C'est lui qui fait voter et valider dans un premier temps par le Conseil d'Administration la vente de la régie pub....et qui, tout de suite après sollicite un nouveau vote toujours du même C.A. afin d'engager des dsicusssions exclusives avec Publicis et Courbit..."sans subir aucune influence", il l'a récemment réaffirmé au JDD!
Et voila, à présent, comme l'écrit Libé que "la présidence de France Télévisions juge la privatisation « clairement enterrée »"
Franchement, c'est surréaliste. De qui se moque-t-on ?
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire