Dans un contexte particulièrement explosif, lié entre autres aux erreurs de Mathieu Gallet qui vient vient d'envoyer un courrier d'excuses aux personnels de Radio France et du plan de "départs" qu'il vient d'annoncer ce matin en C.C.E. (300 personnes au bas mot!), le CSA ne peutplus se permettre la moindre erreur.
Sans développer plus avant, le blog CGC Média vous propose de découvrir ci-après l'article en question dans son intégralité.
La scène se
déroule, le 12 janvier, dans le bureau de François Hollande à l'Élysée, cinq
jours après les attentats islamistes. Le chef de l'Etat, encore ulcéré par certaines images et certains commentaires saisis sur le petit
écran, est entouré de son secrétaire général, Jean-Pierre Jouyet, de la ministre
de la Culture et de la Communication, Fleur Pellerin, du président du Conseil supérieur de l'audiovisuel
(CSA), Olivier Schrameck, ainsi que de sa conseillère chargée des
questions audiovisuelles, Audrey Azoulay.
France
Télévisions, BFM TV, iTélé... la canonnade du président n'épargne personne.
Cette charge est suivie, quelques jours plus tard, d'une salve d'objurgations dispersée par le CSA aux quatre
coins du PAF.
Après avoir
raccompagné sa conseillère et Fleur Pellerin, Hollande reste de longues minutes
en tête à tête avec son grand chambellan
et le gendarme de l'audiovisuel, deux hommes avec lesquels il souhaite
aborder en toute confidentialité la question qui le taraude : la nomination, à la fin d'avril, du prochain PDG de France
Télévisions, le successeur de Rémy
Pflimlin.
Pour Hollande, la
télé publique est aussi importante que l'école.
Lors de son
élection, en 2012, le chef de l’État jure pourtant qu'il ne se mêlera pas de ce
dossier. Il dit alors vouloir rompre avec les pratiques de son prédécesseur.
Mais un élément le fait ensuite changer d'avis : la séquence
"Charlie".
Pour lui, la télévision publique joue un rôle
central, au même titre que l'école.
Ce sont, soutient-il, deux vecteurs de "réconciliation",
de "refondation" de la société et de "cohésion sociale".
La perspective de
l'élection présidentielle de 2017 pèse également dans son esprit. Le mandat du
futur patron de France 2 et de France 3 enjambera cet horizon, et cette femme
ou cet homme aura à affronter l'obstacle dans un climat politiquement
explosif. Enfin, il y a l'état de
délabrement budgétaire de France Télévisions, mammouth de l'audiovisuel
public, qui le préoccupe.
L'actuel
PDG de France Télévisions, Rémy Pflimlin, se succéderait bien à lui-même. Pas
favori, il espère néanmoins profiter de la multitude des candidatures.
Lors de la conversation à huis clos du 12 janvier,
François Hollande évoque la procédure de désignation mise en place par le CSA, le profil des premiers candidats qui émergent et
dont le Tout-Paris se fait déjà l'écho, ainsi que l'importance que revêt à ses
yeux le choix final.
Interrogé alors
sur le rôle qu'il entend jouer, le président répond clairement que, s'il
n'interférera pas dans le processus de désignation, s'il respectera
l'indépendance et les prérogatives du CSA, il récusera en revanche celles et
ceux qui ne lui siéront pas. [N’oublions pas que l’État donc les
contribuables français, sont propriétaires de de France Télé, ndlr]
En un mot, il
revendique un droit de veto... que l'UMP
entend également faire valoir le moment venu si elle juge l'heureux élu trop
politiquement engagé. Bref, chaque camp prépare ses feux rouges et ses
feux verts, voilà Olivier Schrameck prévenu !
Face à de telles
injonctions, quelle sera sa réaction ?
Les entendra-t-il
ou en fera-t-il des confettis ? Nommé à la tête du Conseil supérieur de
l'audiovisuel en janvier 2013, ce grand
commis de l’État, au regard laser et à la séduction onctueuse, a dirigé
avec autorité le cabinet de Lionel Jospin, alors Premier ministre, de 1997 à
2002. Il n'entretient pas de très bonnes relations avec François Hollande,
qui l'a nommé. Ce dernier manifeste, en retour, une méfiance mêlée d'agacement
envers celui qui le recevait entre deux réunions, dans son bureau de l'hôtel
Matignon, quand il n'était encore que le premier secrétaire du Parti
socialiste.
A la tête d'un
organisme de régulation qui garde à bonne distance l'exécutif et toise avec une
certaine jubilation ministres, conseillers et petits marquis de la République, Schrameck
fait de l'indépendance de son institution une arme de dissuasion. Et de sa
présidence, un maroquin : l'intéressé a
rang de vice-ministre de la Communication, au grand dam de Fleur Pellerin,
cantonnée à un rôle décoratif.
Hollande-Schrameck...
Du chef de l'État ou du président du CSA, on ne sait pas toujours qui est le suzerain
et qui est le vassal. Voilà deux puissances - l'une politique, l'autre
cathodique - qui s'observent et se jaugent. D'un côté, le Château, de l'autre, la tour Mirabeau. C'est
ici, dans ce donjon de verre et d'acier planté sur les bords de la Seine, que
l'ex-éminence de la Jospinie est retranchée avec ses troupes.
Fort de quelque
308 collaborateurs et d'un budget de 39 millions d'euros, le CSA, récemment
réorganisé, a tout d'un gouvernement. Olivier Schrameck, son cabinet et les
sept membres qui composent avec lui le collège règnent sur une armée de
petites mains, les "services". Les
réunions plénières du mercredi matin ont des allures de Conseil des ministres,
et les communiqués de l'institution, la forme de sentences régaliennes. Le
CSA est un État dans l'État, que l'on peine à suivre à l’Élysée, où Olivier
Schrameck est qualifié d'"illisible".
Le
bilan de Thierry Thuillier à la direction de l'information est plutôt encensé,
mais sa reconduction n'a pas forcément les faveurs de l’Élysée. La
nomination à la présidence de Radio France, contre toute attente, en février
2014, de Mathieu Gallet - un ancien membre des cabinets de Christine Albanel
puis de Frédéric Mitterrand, au ministère de la Culture - a pris de court l’Élysée, où l'on se gausse, aujourd'hui, des difficultés que rencontre
ce jeune PDG de 38 ans. "Une
gravure de mode choisie sur sa bonne mine", raille-t-on, et qui a été
épinglée, la semaine dernière, par Le Canard enchaîné, pour des travaux
somptuaires (100.000 euros) dans son bureau.
Les dirigeants
proches de Sarkozy? Élimines...
Avec France
Télévisions, l'enjeu politique est autrement plus important qu'avec Radio
France. Dès l'été dernier, François Hollande s'intéresse au sujet et joue les
chasseurs de têtes. "Je voudrais
trouver le Bertrand Meheut d'il y a dix ans", confie-t-il alors à l'un
de ses visiteurs, en référence à l'actuel PDG du groupe Canal +. Meheut, que
ses troupes, à son arrivée, avaient affublé du sobriquet de "Baygon
vert", en référence à ses années passées dans l'univers des pesticides
chez Rhône-Poulenc, est devenu l'une des pointures du monde de
l'audiovisuel.
Le chef de l'État
approche, tour à tour, la directrice générale d'Artemis (groupe Pinault),
Patricia Barbizet, puis une figure de la finance, le président de Weinberg
Capital Partners, Serge Weinberg, avant de jeter son dévolu sur le PDG de
Canal + France, Rodolphe Belmer.
Tous déclinent,
notamment en raison de la trop faible rémunération du poste : moins de 300.000
euros par an, le quart de ce que perçoit Belmer, par exemple. Dans le même
temps, François Hollande barre d'un trait de plume tous ceux qui ont approché,
de près ou de loin, Nicolas Sarkozy, qu'il s'agisse du patron de RTL,
Christopher Baldelli, du président d'Europe 1, Denis Olivennes, ou encore du
PDG de la Fnac, Alexandre
Bompard. Cela tombe bien : ils ne sont
pas candidats !
Présent, le 12
mars, à la soirée d'anniversaire de Julien Dray, le chef de l'État étrille encore
quelques autres personnalités, vraiment en lice cette fois-ci, et tacle au
passage Olivier Schrameck, jugé "imprévisible". Avant de tracer pour "France Télés" le portrait-robot d'un
"capitaine d'industrie"... qu'il dit ne pas avoir découvert.
Le
chef de l’État revendique un droit de veto dans le choix des candidats. Comme
son prédécesseur.
Ce
n'est pourtant pas faute de postulants ! Parmi les éventuels prétendants, qui
ont jusqu'au 26 mars pour faire acte de candidature, figurent, sous réserve, le PDG de
l'AFP, Emmanuel Hoog, l'ancien
directeur des programmes de France Télévisions Pascal Josèphe, deux cadres (ou ex-cadres) d'Orange, Patricia Langrand et Delphine Ernotte, un reporter et
syndicaliste de France 3, Serge Cimino, l'ex-patron
de Lagardère
Active Didier Quillot, ou
encore le directeur général de Microsoft MSN, Alexandre Michelin,
la présidente de France Médias Monde, Marie-Christine
Saragosse, le directeur de la Monnaie de Paris, Christophe
Beaux, ainsi
que le président du directoire du groupe Le Monde, Louis Dreyfus... Et cette liste n'est pas exhaustive !
L'actuel PDG de
France Télévisions, Rémy Pflimlin, serait également sur les rangs : le
dirigeant, qu'entoure un dernier carré d'affidés, pense pouvoir sortir de la
mêlée et se succéder à lui-même.
Seule certitude,
cette foire d'empoigne voit ce beau monde faire feu de tout bois et le siège du
CSA. Qu'ils soient politiques, communautaires, francs-maçons ou
professionnels, les réseaux et lobbies de tout poil s'entre-déchirent et
cherchent à faire valoir leurs préférés en coulisses. Ainsi, le mercredi 11
mars, au restaurant « Les Deux Abeilles », à Paris, se tient un
"raout" organisé par Bibiane Godfroid, une dirigeante de M 6 bien en
cour à l'Élysée et décorée quelques heures plus tôt de la Légion d'honneur par
le chef de l' État.
Arrivé sur les lieux, ce dernier est pris en chasse par la
soixantaine d'invités présents, dont
trois des candidats à la présidence de France Télés, qui l'abordent la mine
mendiante, guettant chez lui un sourire ou un mot d'encouragement dont il ne
leur fera pas l'aumône. Le président parle politique et Jeux olympiques, mais
ne prononce pas un mot sur le sujet qui les hante...
A "France
Télés", on ne froisse personne et on fait profil bas.
C'est à la
mi-mai, au plus tard, que le CSA installera le nouveau PDG de France
Télévisions. L'heureux élu prendra officiellement son poste le 22 août, date à
laquelle expire le mandat de Rémy Pflimlin. Dans l'attente de cette nomination, l'entreprise semble en suspens.
Car à nouveau PDG nouvelle équipe : l'adage inquiète en interne, et les
cardinaux de Pflimlin veillent au grain.
Dans l'attente du
verdict du CSA, il ne faut froisser personne et faire profil bas. Le journal de
20 heures, que le cabinet de François Hollande juge trop libéral et trop
critique à l'égard de la politique du gouvernement, a été lissé ces dernières
semaines. Il en va de même des éditos du chroniqueur économique maison,
François Lenglet, souvent remisés ces derniers temps. En revanche, les indices
d'une reprise économique éventuelle sont mis en avant plus que de
coutume...
Une question
agite spécialement l'équipe en place. Qui pour diriger l'information demain ?
Thierry Thuillier, dont on salue le bilan, sera-t-il maintenu, alors qu'à
l'Elysée certains réfléchissent déjà à un autre casting. Une évidence : à
vingt-six mois de l'élection présidentielle, la direction de l'information de
France Télévisions est le seul poste sur lequel le prochain patron de la
télévision publique aura peu de prise.
Une réalité aussi
vieille que l'ORTF, qui ne décourage pas l'escadron de candidats en lice, des
hommes et des femmes prêts à toutes les contorsions et capitulations pour
atteindre le sommet de ce qu'ils prennent pour l'Olympe et qui s'apparente
pourtant, de plus en plus, au Golgotha."
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