Lettre ouverte d'ex CFDT aux
salariés de France Télévisions "Pourquoi nous avons quitté la
CFDT pour l’UNSA-France Télévisions"
Dans une lettre ouverte adressée aux
salariés de France Télévisions, nombre d’ex CFDT, délégués syndicaux
centraux, délégués syndicaux, élus, signataires de textes ou simples militants,
ont décidé d’informer les salariés du groupe audiovisuel des raisons de leur
départ de la CFDT pour rejoindre l’UNSA.
Après l’implosion de Force Ouvrière
à France Télévisions et le défection de plusieurs de ses adhérents et pas des
moindres, entre autres le Secrétaire
Général et la Trésorière du SNFORT en août 2017 qui expliquaient dans un
courrier (*ci-après)
les raisons qui avaient conduit à leur
départ:« Les
Valeurs, l’éthique, piliers de notre action et auxquelles nous croyons, ont été
définitivement et gravement bafouées»
« Nous ne nous
reconnaissons plus au sein de la section FO France Télévisions… », c’est donc au tour de la CFDT de
subir le même sort.
(*)
Le blog CGC
Média vous propose de découvrir ce courrier qui sort au moment où l’ADAP
(Association de Défense de l’Audiovisuel Public) écrit « Le syndicat crypto-communiste ne dit pas
grand-chose et pour cause. On comprend tout quand on lit les accords secrets et confidentiels que ce
syndicat a signés, il y a quelques temps, avec la direction : je te
soutiens à fond et toi tu recrutes mes gars !
Et comme la direction assure la gestion des personnels syndiqués : les
permanents sont assurés d’une belle carrière et d’un beau pactole en partant en
retraite !
Bon il est vrai que ce sont des accords embarrassants puisque
illégaux : une direction d’entreprise ne peut privilégier un seul
syndicat !...»
Si de tels accords secrets devaient exister nul
doute que le SNPCA-CGC mandaterait immédiatement ses avocats afin qu’ils
saisissent sans délai les juridictions pénales compétentes pour non
seulement les dénoncer, les sanctionner mais aussi faire condamner leurs auteurs.
Pour l’heure, le blog CGC Média vous
propose donc de lire la lettre ouverte des ex CFDT dont beaucoup ont déjà
rejoint l’UNSA.
« Lettre ouverte aux salariés de
France Télévisions ».
Pourquoi
nous avons quitté la CFDT pour l’UNSA-France Télévisions
Marie-Laurence Gressier,
Nicole Perrot, Patrice Christophe, Aldo Fogacci, Thierry Vildary, Laurence
Barbry, Laurence Vaury, Freddy Bertin, Jean-Pierre Lannaud, Mickaël Petit… et
d’anciens adhérents de la CFDT
Nous tous, militants,
élus, délégués syndicaux centraux, délégués syndicaux, signataires de ce texte
refermons plusieurs dizaines d’années d’engagement syndical à la CFDT. Ceux qui nous
connaissent, individuellement, savent que nous avons toujours agi dans
l’intérêt des autres, en particulier des plus faibles, sans distinction de
métier ou de position dans l’entreprise, sans importance sur l’appartenance ou
non à une organisation syndicale. Ce sont des valeurs qui nous rassemblent.
Une situation de plus en
plus dégradée
Depuis maintenant une
dizaine d’années, et plus particulièrement depuis la création de la fameuse «
entreprise unique », chacun a pu constater dans son quotidien les effets
néfastes d’une technocratisation de France Télévisions. Nous déplorons
l’empilement de strates bureaucratiques dont le but unique est de produire des
normes et des contraintes administratives, avec pour conséquence la réduction
des moyens dont chacun a besoin pour faire son travail, étouffant ainsi la
créativité dont toute entreprise audiovisuelle a besoin. Une structure qui pèse
financièrement sur la performance de l’entreprise et qui génère un coût
exorbitant du fait de la dégradation des conditions de travail de chacune et
chacun d’entre nous.
Il s’agit d’une stratégie
à long terme qui traverse plusieurs présidences et dont l’objectif final est de
transformer France Télévisions en tuyaux et plateformes qui achèteraient les
contenus qu’elles ne fabriqueraient plus. Ce «bureau des commandes» serait
ainsi débarrassé des emmerdeurs (euses) qui connaissent leur travail, savent
comment le faire et surtout comment le faire évoluer.
Un « marche ou crève »
sous le martinet d’un discours culpabilisant, dans une entreprise dont les
salariés seraient « in-réformables », trop payés, trop nombreux.
Info et production, on
touche aux deux réacteurs d’un groupe audiovisuel, ceux qui lui permettent
d’exister et d’assurer son indépendance éditoriale.
Parallèlement
l’avenir radieux de la télé qu’on nous promet, c’est à dire le numérique, la
chaine info et même un feuilleton (à condition qu’il marche), sont mis sur pied
dans des conditions de précarité extrême qui essorent les salariés de tous
niveaux et dans tous les secteurs. Un « marche ou crève » sous le martinet d’un
discours culpabilisant, dans une entreprise dont les salariés seraient «
in-réformables », trop payés, trop nombreux.
Des années de combat
Face à cela, de quels
moyens les salariés disposent-ils pour défendre leur outil de travail ? En fait
assez peu et assez faibles. Aujourd’hui deux syndicats, la CGT et FO, peuvent à
eux seuls signer et valider des accords. Ce qu’ils font largement après
quelques faux-semblants de négociation et de grèves pour sauver la face. Ils
signent tout. La CFDT, le SNJ, la CGC et ponctuellement SUD représentaient une force d’opposition
significative, mais souvent insuffisante face à l’alliance de ces deux
centrales avec la Direction.
Une situation
insatisfaisante pour beaucoup d’entre vous. Il était frappant de noter que,
lors des récentes AG des rédactions nationales à l’automne dernier, les
syndicats étaient quasiment absents de ce mouvement !
Il y a quelques années
s’est imposé à nous un autre moyen de se faire entendre, original certes mais
aussi une obligation morale : les actions en justice au pénal. La première
initiée par la CGC a donné lieu à l’affaire Bygmalion version FTV et à la
condamnation en première instance de son ancien Président, Patrick de Carolis
et de deux anciens hauts dirigeants.
Nous, signataires de ce
texte, avons à l’époque pesé de tout notre poids pour que la CFDT se constitue
partie civile, dans une affaire où notre entreprise s’est fait soutirer en
marchés bidons plus de 2 millions d’euros. Ce fut le début des ennuis. Il y
eut, peu après, les premiers « retours », venant des strates nationales du
syndicat CFDT sur l’utilité d’une telle action. Ceci venait en écho avec les
critiques de nos collègues de FO et de la CGT (« la plainte people »), tandis
que France Télévisions se contentait, en justice, du service minimum en ne
demandant que l’euro symbolique et si possible une dispense de peine quand, 4
ans après la première plainte, la justice convoqua enfin ces messieurs en
audience.
Il est pourtant évident
que des dirigeants qui « tapent dans la caisse » et s’arrangent entre eux
doivent rendre des comptes. Il est incontestable que ces pratiques de
l’entre-soi, des copinages et des renvois d’ascenseurs, doivent être bannies.
Comment, sinon, des dirigeants peuvent-ils être crédibles pour engager 2
milliards d’euros de dépenses de programmes, et garantir l’indépendance et la
qualité de l’information publique ? Ces pratiques nous apparaissent encore
moins supportables quand on demande sans cesse aux salariés de faire plus avec
moins.
À l’été 2015 on allait
franchir un nouveau stade. Alertés par des témoignages et des articles
dépeignant ce qui ressemble fort à une élection arrangée, nous décidions, la
section CFDT France TV avec la CGC, de déposer un recours puis une plainte
contre le CSA, concernant le scrutin qui a permis l’élection de notre actuelle
présidente. Encore une fois, il s’agit tout simplement de morale mais aussi de
garantie de bonne gestion de l’entreprise et d’indépendance.
Là encore les mêmes
syndicats nous ont craché dessus mais ils ont trouvé du renfort.
La CFDT désormais aux ordres
?
Notre propre syndicat
national CFDT, a tenté de faire retirer cette plainte auprès de notre avocat,
organisant par ailleurs des rendez-vous avec la Présidence « dans le dos de la
section CFDT France Télévisions», et poussant une forme de contestation
minoritaire en interne, sur l’air de « on ne peut pas s’opposer à tout et ne
rien signer ». Il est vrai que depuis, ce qui reste de la CFDT a décidé de
rattraper le retard et signe pratiquement sans discontinuer ce que lui tend la
direction, pour les bénéfices que chacun d’entre nous constate, chaque jour.
Qu’on s’entende bien, il n’est pas question de
prétendre incarner une ligne contestataire à tout crin, simplement il nous est
apparu hors de question de signer des pseudo-accords qui taillent dans le
contrat social des salariés, sans aucune contrepartie, voire pire puisque la
Direction a pris maintenant l’usage de ne respecter d’un accord que ce qui
l’arrange, quand cela l’arrange et surtout avec qui elle s’arrange. Nous aurons
l’occasion d’en reparler…
Un théâtre de la technocratie sociale obsolète et
poussiéreux qui ne trompe plus personne, même pas ceux qui en profitent.
Le refus des faux-semblants
Nous en avons donc conclu que nous étions dans un
syndicat qui n’était plus prêt à employer tous les moyens de la démocratie pour
défendre l’entreprise contre d’éventuelles magouilles ni ses salariés dans
cette grande période de mutations. Tout devait rentrer dans l’ordre, les petits
marchandages devaient se poursuivre, accompagnés des petites trahisons, de la
mise en place de petites commissions de suivis et des petites saisines pour
faire mine de corriger ce que la Direction ne respecte pas. Un théâtre de la
technocratie sociale obsolète et poussiéreux qui ne trompe plus personne, même pas
ceux qui en profitent. Pendant ce temps chacun constate, dans son quotidien,
dans quel sens les choses évoluent…
La vraie question qui se posait à nous fut alors :
comment être efficace pour le bien commun, honnête face à nous-même et face à
vous, nos collègues.
Nous avons donc décidé de quitter la CFDT, une
histoire de plusieurs décennies pour la majorité d’entre nous. Mais nous avons
également décidé de ne pas abandonner nos valeurs et notre attachement à
l’intérêt collectif.
Envie d'un syndicat vraiment indépendant
?
Avec l’UNSA nous créons un syndicat vraiment libre,
entièrement et uniquement centré sur les enjeux et les problématiques de France
Télévisions et de l’audiovisuel public :l’UNSA France Télévisions
Autonome financièrement, syndicalement,
idéologiquement, l’UNSA France Télévisions n’a de compte à rendre qu’à
ses adhérents et aux salariés permanents et non permanents, techniciens,
journalistes, administratifs, intermittents de France Télévisions. L’UNSA
France Télévisions ne rend de compte à aucune officine, aucune centrale, aucun
groupe de pression.
Historiquement une section de l’UNSA à FTV
représentait les réalisateurs, désormais, ses statuts modifiés lui permettent
de représenter clairement tous les salariés du Siège, d’Outremer et de
Régions. Ce que nous avons déjà commencé à faire.